L’OTAN et le nouvel unilatéralisme

Publié le par Duke

Par Normand Baillargeon, Mondialisation.ca, Le 25 aout 2009




On connaît peut-être le bon mot de Bertrand Russell sur les religions:« On dit souvent que c’est un grand mal de s’attaquer aux religions parce que la religion rend l’homme vertueux. C’est ce qu’on dit; je ne l’ai jamais observé.» 

Pour résumer ce que je pense qu’il convient de dire sur l’OTAN, on pourrait parfaitement utiliser une formule similaire. Pour les quatre premières décennies de son existence, cela donnera: «On dit souvent que c’est un grand mal de s’attaquer à l’OTAN parce que l’OTAN nous défend contre les attaques du Bloc de l’Est. C’est ce qu’on dit; je ne l’ai jamais observé.»

Depuis deux décennies, la formule serait : « On dit souvent que c’est un grand mal de s’attaquer à l’OTAN parce que l’OTAN nous défend contre les terroristes et répand la démocratie. C’est ce qu’on dit; je ne l’ai jamais observé.»

L’OTAN réel derrière l’OTAN proclamé : première version

«Keep Russians out, Americans in and Germans down» : tel était le slogan par lequel en 1949, au moment de sa création, l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord, définissait, par la voix de son premier Secrétaire Général, sa triple mission — la première, de défense mutuelle contre l’URSS étant donnée comme étant, de loin, la plus importante.

Il a fallu une bonne dose de propagande pour faire croire que l’URSS, en 1949, représentait une  menace réelle contre laquelle la nouvelle organisation allait nous défendre. Face à une URSS affaiblie et dévastée par la guerre, on trouvait en effet des Etats-Unis dont cette même guerre avait relancé l’économie et en possession exclusive de l’arme atomique, dont ils venaient de faire l’usage deux fois plutôt qu’une.

L’OTAN, d’emblée, eut donc une autre mission que celle qu’elle mettait en avant. Au cœur de cette mission réelle figuraient en bonne place, d’une part la lutte contre les multiples formes de «subversions internes» que représentaient les avancées des politiques et des partis européens de gauche et que la guerre avait renforcés, d’autre part la déstabilisation de l’URSS.

À ces fins, durant les quatre premières décennies de son existence, l’OTAN multiplia en Europe les mesures contre la gauche, y appuya les régimes de droite et d’extrême-droite ainsi que des groupes terroristes, et alimenta une course aux armements sur fond de Guerre Froide et de destruction mutuelle garantie (Mutually Assured Destruction, ou MAD).

Herman, qui rappelle tout cela dans un récent article, résume parfaitement la situation qui prévaut jusqu’au début des années 90 quand il écrit de l’OTAN de cette époque qu’elle est: «une organisation offensive et non défensive, opposée à la paix et à la diplomatie, engagée dans des opérations terroristes et d’autres formes d’interventions politiques non-démocratiques et qui représentent, en fait, autant de menaces pour la démocratie (1)».

Avec la chute de l’URSS, en 1991, la raison avancée pour fonder l’OTAN devenait manifestement intenable, même aux yeux des plus fervents idéologues : et si cette raison n’avait pas été un simple prétexte, l’OTAN aurait été démantelée cette année-là, ou peu de temps après.

Mais si l’OTAN officielle avait perdu toute raison d’être, l’OTAN réelle restait pertinente et elle n’allait pas tarder à trouver de nouvelles justifications à son existence.


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